La pastorala dels volurs

La pastorale des voleurs

Édité en occitan et en français dans Auteurs en scène, 1996

Deux actes (8 + 10 scènes)
5 personnages, une femme (Ginèbra) et 4 hommes (Calista, paysan, et trois mendiants : Marcafavas, Pujarniscle, Sacrapenha).

Une cuisine dans un mas. Temps mythique.

La pièce a été donnée pour la première fois dans sa version occitane (avec surtitrages) le 5 juillet 2008 à Nîmes, par la Compagnie Gargamela, dans une mise en scène d'Annette Clément. 

 

Un soir de Noël, un riche paysan et sa femme se lamentent sur la malhonnêteté des pauvres. Deux mendiants frappent à la porte et se font mettre dehors. L'un d'eux, ancien séminariste, parvient cependant à persuader la femme, restée seule un moment, qu'il est saint Pancrace et son compagnon saint Gabriel, en mission sur la terre. Accueillis comme il se doit, les deux prétendus saints s'épanouissent dans la chaleur du feu et du vin, puis confient à leurs hôtes un grand secret : un trésor est caché sous la terre à une lieue du mas.

Les deux avares crédules partent avec pelle et pioche pour recueillir le trésor, laissant les deux saints garder la maison. Un troisième larron survient, violent et querelleur, qui réclame sa part du butin. Rixe. Les couteaux sortent. Les deux saints renoncent au butin, l'un par fatalisme de la misère, l'autre par fidélité à leur amitié. Le couple constate à son retour la disparition de ses économies. Pendant que l'homme va chercher du secours, la fermière, plus jeune que son vieil époux, fait la connaissance de son voleur brutal. Elle va tirer le loquet de la porte. Appuyée au mur, à demi-abandonnée à l'homme, elle attend son voleur...

La pastorale traditionnelle, notamment provençale, raconte en général comment, le soir de la Nativité, le méchant égoïste est touché par la grâce et se convertit à la bonté au milieu de l'euphorie générale. Au lieu de l'histoire édifiante que le genre exige, Max Rouquette présente un monde âpre et dur, qui ne sera l'objet d'aucune rédemption. Les pauvres restent pauvres et les méchants méchants. La seule femme de l'histoire sera révélée à son propre désir et s'offrira en proie à la brutalité de son voleur, couronnant par l'adultère ce ballet des égoïsmes. La seule lueur de bonté provient des deux vagabonds, Manjafavas et Pujaniscle, qui renoncent à l'argent par fidélité à leur misère et à leur amitié. Pourtant La Pastorala dels volurs ne baigne pas dans le sordide, mais elle est empreinte d'une sorte de cynisme léger, quasi aérien, qui tient à la poésie des dialogues et transfigure le réel. La grâce de Noël touche bel et bien la pièce, puisque l'évocation de cette nuit magique saupoudre les personnages de sa féerie.

La Pastorala dels volurs, probablement écrite dès le début des années 50, doit beaucoup au théâtre de l'Irlandais John M. Synge, que Max Rouquette découvre dès 1942 en entendant Maria Casarès dire à la radio Deirdre des Douleurs, qu'il pourra lire dans la traduction de Maurice Bourgeois et dont il traduira deux pièces en occitan (Lo Balarin dau mond occidentau et L'ombra de la comba). L’univers des deux écrivains présentent d’étonnantes convergences. On y retrouve la même exaltation de l'errance, les mêmes personnages de vagabonds, la même atmosphère à la fois cruelle et poétique.

(J-C.Forêt)

 


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